lundi 29 janvier 2018

ENTRÉE CCCLVIII(358) - RÉFLEXIONS

ENTRÉE CCCLVIII
29-01-2018
RÉFLEXIONS


" Quand on se considère mort, la mort ne fait plus peur." Kim Thuy

J'ai entendu cette phrase ce soir en écoutant une émission, prononcée par l'auteure et réfugiée Kim Thuy. Elle m'a collé à la mémoire et au coeur. Je n'arrive pas à la mettre de côté et donc je cherche à comprendre pourquoi elle me touche autant.

Mon beau-frère me disait récemment que pour parler de ma mort comme j'en parle je dois certainement faire semblant que tout va bien. Cela m'a fait réfléchir et je suis venu à la conclusion que je ne fais pas semblant. Alors pourquoi est-il "facile" pour moi de parler de ma mort, de la regarder en face, d'y faire référence, etc... Pourquoi ? Comment se fait-il que le sujet n'est pas tabou dans mon cheminement ? D'où vient ce sans gêne face à ma propre mort? J'ai même parlé avec Nycole de l'importance de rester ouverte à une nouvelle relation après ma mort. C'est d'ailleurs ce qui a suscité la réaction de mon beau-frère.

Dieu sait que j'ai connu plusieurs patients incapables de parler de leur mort et qui ne voulaient pas que leurs proches en parlent non plus. Mais j'en ai connu d'autres qui y faisaient face avec courage et ouverture. Les récits de leurs histoires sont le sujet d'un livre que j'ai écrit JE NE MOURRAI PAS AVANT D'ÊTRE MORT !Il ne se trouve qu'en ligne seulement pour la version papier ou électronique (http://fr.blurb.ca/b/8288790-je-ne-mourrai-pas-avant-d-tre-mort).

Il est certain que mes vingt années dans le domaine des soins palliatifs m'ont bien préparé pour vivre ce cheminement avec ARNOLD.  Ces expériences me permettent certainement de voir venir un peu ce qui m'attend à chaque étape. Évidemment je ne suis pas mes patients. Je vis donc chaque étape pour moi même,  mais je crois que mes patients m'ont légués des habiletés et des attitudes qui me rendent plus "facile" mon cheminement. J'espère que vous avez bien remarqué les guillemets autour du mot facile.

Est-ce que je fais semblant ? Est-ce que de parler de ma mort est une façon de braver des émotions enfouis ? J'en viens donc à la citation de Kim Thuy. "Quand on se considère mort, la mort ne fait plus peur." La question se pose est-ce que je me considère déjà mort? Voilà la question qui me tracasse ces jours-ci et pourquoi Kim Thuy m'a tellement interpellé avec cette phrase. Je dis que la question me tracasse ces jours-ci car depuis quelques semaines je me sens distant, un peu détaché, paresseux, plus introverti qu'extraverti. La question m'est venu si je commençais une dépression. Il me semble que chaque activité me demande plus d'efforts, pas seulement physiquement mais psychologiquement aussi.

J'avoue en même temps que j'ai plus de douleurs maintenant et que la morphine devient une compagne de plus en plus présente au quotidien. Aussi j'ai eu un virus qui m'a vraiment assommé et m'a mis face à ma vulnérabilité. Aussi le fait que je sois transféré à l'équipe des soins palliatifs rend la fin plus palpable je pense bien. 

Tout ceci étant dit je précise, autant pour moi que pour les miens,  que je poursuis mon désir de vivre le plus longtemps possible. Je n'ai pas baissé les bras. Mais je constate que je chemine d'une façon différente. L'inévitabilité de la mort qui approche affecte sans conteste ma façon de voir la suite des choses pour moi. Je trouve cela triste, car ça confronte mon leitmotive JE NE MOURRAI PAS AVANT D'ÊTRE MORT. C'est comme si j'entre dans une étape d'intériorité qui me rend peut-être un peu plus distant avec tout le reste, J'espère que non, car je pense qu'il est trop tôt. Alors je vais mettre la cause de cette distance sur la fatigue liée au virus, à la morphine et la gestion de la douleur.

Ce sera sûrement le sujet de ma prochaine visite chez la psychologue haha. Dans deux jours je rencontre le médecin des soins palliatifs qui va me suivre en externe. J'ai déjà rencontré l'infirmière du soutien à domicile en palliatifs. Beaucoup de changements qui préparent l'inévitable... mais je ne veux pas me considérer mort avant le temps.  Je prie pour la force de bien rester en vie et dans la vie, ce que cela voudra dire pour moi avec tout ce qui change dans mon corps et dans ma tête.  

Hier le 28 janvier marquait 49 ans de relations amoureuses avec ma douce et les 20 ans de notre premier petit-fils. Wow !  Comment ne pas dire MERCI LA VIE !

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