lundi 29 janvier 2018

ENTRÉE CCCLVIII(358) - RÉFLEXIONS

ENTRÉE CCCLVIII
29-01-2018
RÉFLEXIONS


" Quand on se considère mort, la mort ne fait plus peur." Kim Thuy

J'ai entendu cette phrase ce soir en écoutant une émission, prononcée par l'auteure et réfugiée Kim Thuy. Elle m'a collé à la mémoire et au coeur. Je n'arrive pas à la mettre de côté et donc je cherche à comprendre pourquoi elle me touche autant.

Mon beau-frère me disait récemment que pour parler de ma mort comme j'en parle je dois certainement faire semblant que tout va bien. Cela m'a fait réfléchir et je suis venu à la conclusion que je ne fais pas semblant. Alors pourquoi est-il "facile" pour moi de parler de ma mort, de la regarder en face, d'y faire référence, etc... Pourquoi ? Comment se fait-il que le sujet n'est pas tabou dans mon cheminement ? D'où vient ce sans gêne face à ma propre mort? J'ai même parlé avec Nycole de l'importance de rester ouverte à une nouvelle relation après ma mort. C'est d'ailleurs ce qui a suscité la réaction de mon beau-frère.

Dieu sait que j'ai connu plusieurs patients incapables de parler de leur mort et qui ne voulaient pas que leurs proches en parlent non plus. Mais j'en ai connu d'autres qui y faisaient face avec courage et ouverture. Les récits de leurs histoires sont le sujet d'un livre que j'ai écrit JE NE MOURRAI PAS AVANT D'ÊTRE MORT !Il ne se trouve qu'en ligne seulement pour la version papier ou électronique (http://fr.blurb.ca/b/8288790-je-ne-mourrai-pas-avant-d-tre-mort).

Il est certain que mes vingt années dans le domaine des soins palliatifs m'ont bien préparé pour vivre ce cheminement avec ARNOLD.  Ces expériences me permettent certainement de voir venir un peu ce qui m'attend à chaque étape. Évidemment je ne suis pas mes patients. Je vis donc chaque étape pour moi même,  mais je crois que mes patients m'ont légués des habiletés et des attitudes qui me rendent plus "facile" mon cheminement. J'espère que vous avez bien remarqué les guillemets autour du mot facile.

Est-ce que je fais semblant ? Est-ce que de parler de ma mort est une façon de braver des émotions enfouis ? J'en viens donc à la citation de Kim Thuy. "Quand on se considère mort, la mort ne fait plus peur." La question se pose est-ce que je me considère déjà mort? Voilà la question qui me tracasse ces jours-ci et pourquoi Kim Thuy m'a tellement interpellé avec cette phrase. Je dis que la question me tracasse ces jours-ci car depuis quelques semaines je me sens distant, un peu détaché, paresseux, plus introverti qu'extraverti. La question m'est venu si je commençais une dépression. Il me semble que chaque activité me demande plus d'efforts, pas seulement physiquement mais psychologiquement aussi.

J'avoue en même temps que j'ai plus de douleurs maintenant et que la morphine devient une compagne de plus en plus présente au quotidien. Aussi j'ai eu un virus qui m'a vraiment assommé et m'a mis face à ma vulnérabilité. Aussi le fait que je sois transféré à l'équipe des soins palliatifs rend la fin plus palpable je pense bien. 

Tout ceci étant dit je précise, autant pour moi que pour les miens,  que je poursuis mon désir de vivre le plus longtemps possible. Je n'ai pas baissé les bras. Mais je constate que je chemine d'une façon différente. L'inévitabilité de la mort qui approche affecte sans conteste ma façon de voir la suite des choses pour moi. Je trouve cela triste, car ça confronte mon leitmotive JE NE MOURRAI PAS AVANT D'ÊTRE MORT. C'est comme si j'entre dans une étape d'intériorité qui me rend peut-être un peu plus distant avec tout le reste, J'espère que non, car je pense qu'il est trop tôt. Alors je vais mettre la cause de cette distance sur la fatigue liée au virus, à la morphine et la gestion de la douleur.

Ce sera sûrement le sujet de ma prochaine visite chez la psychologue haha. Dans deux jours je rencontre le médecin des soins palliatifs qui va me suivre en externe. J'ai déjà rencontré l'infirmière du soutien à domicile en palliatifs. Beaucoup de changements qui préparent l'inévitable... mais je ne veux pas me considérer mort avant le temps.  Je prie pour la force de bien rester en vie et dans la vie, ce que cela voudra dire pour moi avec tout ce qui change dans mon corps et dans ma tête.  

Hier le 28 janvier marquait 49 ans de relations amoureuses avec ma douce et les 20 ans de notre premier petit-fils. Wow !  Comment ne pas dire MERCI LA VIE !

jeudi 25 janvier 2018

ENTRÉE CCCLVI(356) - INJUSTICE

ENTRÉE CCCLVI
16-01-2018
INJUSTICE

  • Qu'est ce qui est injuste ?
Quand je travaillais en soins palliatifs c'est un commentaire que j'entendais souvent. "C'est pas juste, pourquoi ça m'arrive à moi ? J'ai mené une bonne vie après tout!" Et parfois on ajoutait même "J'en connais qui mériterait bien plus que moi de mourir."
  • Et tu répondais quoi ? 
Je répondais que la maladie, le malheur et les mauvais "karmas" ne marche pas au mérite. Que des mauvaises choses arrivent aux bonnes personnes et des bonnes choses arrivent aux mauvaises personnes.
  • Cela me semble raisonnable, alors pourquoi abordes-tu le sujet ?
Lors d'un récent souper. On m'a dit que c'était injuste que Nycole et moi on ait a vivre cela. Que nous sommes un couple uni, heureux, dévoué, engagé etc. On ne méritai pas cela.  Alors spontanément la réponse m'est venu que de toute évidence si on regarde un peu autour de nous on constate rapidement que la maladie ne marche pas au mérite.  On a qu'à penser aux enfants malades ! Ils n'ont rien fait à qui que ce soit pour mériter ce qui leur arrive.
  • Encore raisonnable en effet, mais...?
 Non il n'y a pas de mais. Mais (haha) j'ai pris conscience que dans le cœur des personnes qui me partageaient cela il y avait l'expression de toute leur peine de savoir que j'allais mourir et que Nycole me perdrait et vivrait un deuil. Dans ce cri à l'injustice il y a l'expression d'un beau sentiment d'amour. Devant le drame de la mort annoncée ceux et celles qui nous aiment se sentent trichés, même volés.
  • Et toi tu te sens triché ?
Triché? Triché ? Pour me sentir triché il faudrait que j'aie l'impression que quelqu'un d'autre aurait dû avoir mon tour. Je suis incapable de penser cela. Au contraire non seulement je ne me sens pas triché, mais d'une certaine façon je me sens privilégié.  Mon beau frère me demandait si j'étais en colère, si je me mettais en colère contre la vie, ma réponse demeure la même que depuis le début NON. Je ne suis pas en colère. Au contraire de me sentir triché je me sens privilégié. Il est vrai que Nycole et moi nous formons un couple heureux, nous avons fondé une famille heureuse et oui nous avons contribué à la société. Il est vrai que d'autres couples, plus vieux même que nous, semblent encore  chercher encore le bonheur, sont malheureux, ne voient pas la beauté de la vie, etc.... Alors quoi je devrais être en colère parce qu'eux ne vivent pas ce que Nycole et moi vivons avec ARNOLD? Je connais des hommes qui n'ont pas donné le quart à leur famille de ce que j'ai donné à la mienne et à la société, alors je devrais souhaiter qu'ils meurent avant moi ?
  • Tu sais cela n'est pas totalement déraisonnable ?
Déraisonnable ?  Voyons donc. Il y a des gens bien plus méritoire que moi qui ont connu le sort d'une mort hâtive ou d'une grave maladie. Comment décider qui doit vivre, qui doit mourir ? Je crois honnêtement que le mérite n'a rien à voir avec ça. C'est plutôt aléatoire,  "random" comme dise les jeunes.
  • Tu disais que tu te sentais privilégié d'être en fin de vie ?
Ben non j'ai bifurqué dans ma pensée. Je me sens privilégié d'avoir la chance d'avoir vécu une vie de couple et de famille heureuse.  J'ai connu beaucoup de gens qui sont morts assez âgés et malheureux. Je pense que je préfère mourir heureux même si plus jeune. C'est pour cela que je me sens privilégié.  Je suis privilégié de connaître le bonheur, la joie de vivre, même si c'est venu sur le tard de ma vie.
  • Tu pourrais être en colère de te le faire enlever ce bonheur maintenant que tu l'as trouvé ?
Oui j'imagine que je pourrais, mais je ne le suis pas. Par contre je suis contrarié par mon état de fatigue par exemple, par mes douleurs, par mon manque de résistance, contrarié, frustré même.  Il me semble que pour que je sois en colère il faudrait que la notion d'injustice soit impliquée. Là je réfléchis tout haut, Si je me sentais traiter injustement par rapport à d'autres il me semble que je vivrais de la colère, mais je ne ressens pas cela. Qui me traite injustement ? Dieu ? Je ne crois pas du tout que Dieu ait a voir quoi que ce soit avec le fait que j'ai un cancer. Donc qui est injuste ? La vie, me direz-vous ? Mais qui a déjà dit que la vie était juste?
  • Donc ta conclusion ...
Je conclue trois choses. Quand les gens expriment cette notion d'injustice, c'est une façon d'exprimer l'amour qu'ils ont pour l'autre et la peine qu'ils ressentent.Alors je tenterai d'accueillir cet aspect d'abord. Ensuite quand on cri à l'injustice c'est que l'on croit qu'il y a un coupable que nous pouvons blâmer. Je ne vois pas le coupable dans ma situation. Et finalement je prends conscience de cette réalité que je préfère mourir jeune et heureux que vieux et malheureux. Cela ne rend en rien a fin plus facile à envisager ceci étant dit.

MERCI LA VIE !

ENTRÉE CCCLVII(357) - LA PRISON

CCCLVII
25-01-2018
LA PRISON

  • Tu t'en vas en prison ?
Ben non voyons donc, tu sais très bien que je ne vais pas en prison. Par contre j'ai l'impression d'être en prison ces jours-ci.
  • Qu'est-ce qui arrive?
 Il y a différentes sortes de prison cher Watson. Je me sens dans la prison de la fatigue. Ces derniers jours j'ai été passablement malade et assez affaibli. Je me remet mais la fatigue semble se maintenir.
  • D'où la prison ?
Bien d'une certaine façon oui. En prison il y a des barreaux qui contraignent, des portes barrées qui retiennent enfermé, des horaires qui limitent etc... J'ai l'impression que c'est ce que je vis avec la fatigue. Elle me contraint à peu d'activité, je ne peux rien compléter, je commence et m'épuise tout de suite. Je me sens emprisonné parce que c'est de plus en plus difficile pour moi de me mobiliser pour sortir. J'ai de moins en moins le goût de sortir.
  • Crois tu que ce sera passager ?
Je l'espère bien car c'est un peu difficile à vivre étant donné que l'oncologue m'avait dit que j'aurais un regain d'énergies avant que je commence à me sentir de plus en plus fatigué. Alors tu comprends ma déception. De plus le fait que je sois plus inactif, je commence à avoir des douleurs de positionnement aux fesses, aux jambes, etc...
  • Je sens que tu te décourages un peu non?
Peut-être pour le moment. Je ne veux pas tomber dans le découragement et je vais tout faire pour l'éviter mais ce n'est pas facile. Je n'aime pas me sentir limité ainsi mais cependant comme on me l'a brutalement rappelé c'est ce qui m'attend de toute façon. 
  • Comment éviter le découragement ?
Eckart Tollé  prêche l'importance de rester dans le moment présent. Par contre je ne suis pas nécessairement bien dans le moment présent haha. J'ai mal, je me sens mal, je me sens lourd et inconfortable dans mon corps. Pas de grosse douleur, enfin plus de grosse douleur au moins donc cela est aidant. Douleurs de positionnement. Alors si je reste dans le moment présent c'est comme si je dois rester dans mon malaise, dans mon inconfort. Alors sûrement il y a quelque chose que je ne saisis pas dans la philosophie.
  • Tu crois au moment présent ?
Oui oui je crois  au moment présent comme moyen d'éviter de se perdre dans l'anxiété d'anticipation entre autre.Mais quand il y a douleurs, inconforts et malaises dans mon quotidien, dans mon moment présent, je ne sais plus trop quoi faire.
  • Ouin un dilemme en effet...
En tout cas mon espérance c'est que je vais passer par dessus cela avant que la maladie prenne le dessus et que je pourrai profiter du bon temps encore. Peut être que ma définition de "bon temps" devra changer drastiquement. Peut être que c'est cela le moment présent. Apparemment que quand on a une maladie terminale, le moment présent est un excellent lieu de refuge, pas parce qu'il nie la réalité mais parce que l'égo n'est plus nécessaire et l'être est plus libre. Un peu trop compliqué hein ?
  • Oui en effet....
J'ai un peu de difficulté à le dire mais MERCI LA VIE!

dimanche 14 janvier 2018

ENTRÉE CCCLV(355) - L'ANGOISSE

ENTRÉE CCCLV
14-01-2018
 L'ANGOISSE


  • Tu as besoin de moi ? 
Pas vraiment cher égo prétentieux. Je peux très bien faire cette cogitation nocturne sans toi. Mais écoute bien cependant.

" L'angoisse est une grâce car elle nous fait toucher à notre condition humaine, avec sa fragilité, sa mort, ses vides, ses pertes, etc... et là dans la pauvreté même de notre être s'ouvre, insoupçonné, l'infini."  Stéfan Thériault

Dans mon carnet de citations je retrouve celle-ci que j'aime beaucoup. Elle me rappelle que la souffrance soit-elle physique ou morale peut, je dis bien peut, peut être porteuse de quelque chose comme de la VIE. (Je sais! C'est risqué de vouloir justifié la souffrance.)

Dans ma première année avec ARNOLD, je me suis retrouvé souvent éveillé en pleine nuit, comme cette nuit, mais habité par l'angoisse. Je ne suis pas habité par l'angoisse cette fois cependant, enfin je ne le crois pas. Juste réveillé. Mais j'ai découvert durant ces moments d'éveil nocturne qui ont commencé à l'hôpital un espace de révélation non seulement de ma petitesse, de ma fragilité, de ma pauvreté si on veut mais aussi de la présence de Dieu dans ce qui m'est le plus précieux cadeau de ma foi,  son  AMOUR inconditionnel.  

Comme le disait si bien Claudel: "Dieu n'est pas venu supprimer la souffrance. Il n'est même pas venu l'expliquer, mais il est venu la remplir de sa PRÉSENCE"'

Je comprends mieux comment au sein de nos prétentions il nous est plus difficile de prendre conscience que Dieu est présent, dans le sens d'être là, et présent dans le sens de cadeau. Mais au cœur de nos angoisses et de notre fragilité conscientisées, avec suffisamment de foi et d'abandon, sa présence se profile et parfois même s'impose. Un peu comme la lumière d'une petite veilleuse qui ne se voit pas le jour, mais la nuit semble éclairer la pièce. Au cœur de nos nuits Dieu éclaire notre pièce!

Plus jeune j'avais la prétention de croire que l'humain ne devait jamais se dire pauvre, fragile, petit. Je voyais cela comme une façon que les religions nous dépeignaient pour mieux nous contrôler. Mais la vie m'a appris différemment. ARNOLD (mon cancer) m'a appris différemment. Mon angoisse au cœur de ma plus souffrante nuit m'a appris différemment. Au cœur d'une nuit, alors que j'étais à l'hôpital, je me suis rendu à la chapelle et là dans toute ma petitesse, ma fragilité humaine je me suis écroulé dans la noirceur de la pièce et de ma vie. Prenant conscience dans mon corps, mon esprit et mon âme de ma condition, de mon besoin et mon désir de VIE/vie, Dieu s'est fait PRÉSENT/présent. Soudainement il y eut une lumière dans la noirceur de ma pièce et de ma vie.

Edmond Rostand faisait dire à Chanteclerc: " C'est la nuit qu'il est bon de croire à la lumière."    En effet la veilleuse en plein jour m'est peu utile n'est-ce pas ? Mais grâce à elle la nuit mes pas sont plus certains. mon chemin mieux tracé, la nuit moins enveloppante. C'est pourquoi l'enfant dans toute son innocence réclame souvent la veilleuse la nuit. L'enfant comprend, accepte et accueille sa fragilité. Rendu à l'âge adulte cela nous semble plus diffiicile.

Mais l'angoisse en effet peut nous ramener à cet état de manque et de désir, cette nuit, cette noirceur qui fait crier l"enfant en nous, le petit en nous, le fragile en nous pour une veilleuse. Et là, en ces moments, habité de la certitude que DIEU rempli de sa PRÉSENCE ma souffrance, je Le vois, je Le sens, je L'entends -  j'en fais l'expérience. Voilà la grâce que l'angoisse peut permettre. C'est la grâce que je nous souhaite, que je me souhaite au moment où la noirceur me fera peur.
  • Bon... tu as fini petit et fragile que tu es. 
Haha je savais bien que tu n'aimerais pas cette petite réflexion. Cela demande une certaine humilité, et ce n'est pas le propre de l'égo n'est-ce pas? Retourne te coucher. Moi je vais écouter un peu de télé... six heures vient de sonner.

MERCI LA VIE!

jeudi 11 janvier 2018

ENTRÉE CCCLIV(354) - TICTOC !

ENTRÉE CCCLIV
11-01-2018
TICTOC!

Il est 2h15 je suis réveillé pour une raison quelconque, ou devrai-je dire par une raison quelconque. Je ne sais trop.  Je suis frustré de constater l'heure qu'il est alors que je souhaite qu'il soit au moins 5h00. Mon dieu 2h15, non c'est trop tôt, je dois me rendormir ! Un saut vers la salle de bain et je me rendormirai.

De retour dans mon fauteuil je m'installe. Je tousse, Ce satané malaise à la gorge persiste et me fait tousser à quelques reprises. Je deviens impatient. Je prends de l'eau du verre toujours plein la nuit à mes côtés. Je tousse encore. Je me lève pour prendre ma vitamine C naturelle en vaporisateur. "Garde ça sous la langue' m'a dit mon cousin Richard, mon pusher de produits naturels. Je me recouche et je l'entends qui me nargue. C'est grand-père et son TICTOC incessant et si fort qu'il remplit toute la pièce. Évidemment la nuit à tout fait taire. TICTOC.... TICTOC...

C'est comme un berceuse me dis-je en tentant de me leurrer alors que le TICTOC devient de plus en plus fort. Il me semble que les murs en tremble.TICTOC.TICTOC.... TICTOC...
Il me semble réentendre Nycole murmurer à mon oreille le sage conseil de l'autre jour alors que je me plaignais du TICTOC "mais arrête  le grand-père s'il te dérange." Je lui avais répondu que non j'allais m'habituer, après tout il était silencieux depuis des mois, j'étais content de réentendre son mélodieux rappel des quart d'heure. J'avoue que c'était un peu nostalgique, car mélodieux mon oeil! Il s'était passé quelque chose à la voix de grand-père devenu éraillée, sûrement à cause du temps des fêtes. Mais OUF quel son. Mais tout de même heureux de l'entendre  me rappeler le passage du temps.

Ah le passage du temps! Nous y revoilà. Le temps redevenu une denrée rare. Un précieux bien à ménager, comme le sucre ou le lard de Séraphin. TICTOC...TICTOC...TICTOC. Je ne peux m'endormir avec ce tonnerre qui me rappelle cruellement le temps qui fuit inlassablement et impitoyablement. Le temps se fout bien de moi et d'ARNOLD. Le temps se moque de mon agenda à moi, de mes besoins ou de mes désirs. TICTOC...TICTOC...TICTOC....TICTOC.... Il hurle dans mes oreilles comme pour me faire comprendre qu'il est le maître et non moi !

Message reçu. Je me lève de nouveau prendre une pastille BUCKLEYS au goût d'asphalte mais si efficace pour calmer ma toux et adoucir ma gorge un peu irritée. Le temps avait bien fait les choses, De gouffre endolori qu'était mon organe gorgien, voilà qu'il est devenu un peu irrité seulement. En fait le temps fut aidé par une infusion que Nycole préparait d'eau chaude, miel, citron et clous... de girofle évidemment que j'avalais quelques fois, même plusieurs fois par jour, de miel directement dans le gosier, de vitamine C naturelle vaporisée sous la langue et d'asphalte. Ou on en vient à bout ou sinon on bouche les nids de poule.

TICTOC...TICTOC...TICTOC....TICTOC... aarrgghh! rien à faire je ne peux le faire taire le grand-père. Alors suivant le judicieux conseil de Nycole, je me lève et met la main sur son organe balançant, le saisit et l'immobilise. Ahhhhh! Un peu comme je faisais quand l'infusion de Nycole, bien tiède adoucissait ma gorge en feu, le silence enfin retrouvé remplissait mon salon (qui fait office de chambre depuis deux ans). Silence.... Silence.... Silence....  J'avais donc raison il y a quelques années quand je me suis objecté à l'installation des horloges murales dans les chambres de mes patients aux soins palliatifs. "C'est cruel" avais-je tonitrué. "En face du lit en plus' insistais-je indigné. Quel beau rappel du temps qui crisse son camps. "Au moins si vous aviez choisi des horloges silencieuses, mais non en plus le sacré TICTICTIC qui ne cesse jamais de les narguer." Le silence retrouvé et le calme installé me donnent raison. Je me recouche.

Je tousse encore, les oreilles me piquent, je me gratte, je tourne d'un bord puis de l'autre... le silence revenu ne m'empêche pas d'entendre le TICTOC du temps qui fuit. Il est dans ma tête maintenant. Alors ne perdons pas le temps qui fuit! Je me lève et j"écris ceci avant de poursuivre la correction de la traduction de mon livre en anglais. Éventuellement la fatigue me fera tomber.

MERCI LA VIE !

mardi 9 janvier 2018

ENTRÉE CCCLIII(353) - UNE AUTRE ÉTAPE

ENTRÉE CCCLIII
09-01-2018
UNE AUTRE ÉTAPE!

  • Ah oui que se passe-t-il ?
Eh bien j'ai rencontré mon oncologue tantôt et elle m'informe que je passe à une autre étape. Disons que l'étape de la chimiothérapie est arrivée à sa fin.
  • Oh oh, pas une bonne nouvelle ça?
Pas la meilleure nouvelle en effet. Le cancer progresse. Les métastases au foie augmentent, le ganglion à l'entrée du foie a augmenté et une de mes nodules pulmonaire aussi. Donc mon taux de cancer dans le sang monte  en flèche. Alors le traitement, mon troisième protocole n'est plus efficace.
  • Donc tu y vas pour un quatrième ?
Pas vraiment. Elle n'a plus grand chose d'intéressant à m'offrir. Le dernier traitement possible a un haut taux de toxicité et un bas taux de prolongation, quelques semaines tout au plus. Alors nous avons convenu que cela n'en valait pas la peine. 
  • D'où une autre étape qui commence ?
 Une étape que j'appellerais une ÉTAPE CADEAU. Oui elle me transfère à l'équipe des soins palliatifs. Mais ce n'est pas urgent je ne mourrai pas demain. On me donne un pronostic d'au moins six mois, mais peut être plus. Je crois que ce sera sûrement plus. Non j'ai bien l'intention de VIVRE le plus longtemps possible. Mais VIVRE par exemple. Profiter de la vie au max. Voilà pourquoi c'est un cadeau. Je PEUX voir venir les choses et en effet profiter du temps qu'il me reste. Imagine la personne qui quitte la maison le matin et se fait frapper et meurt, ou fait une crise cardiaque mortelle. Imagine ce qu'elle aurait peut-être voulu faire ou dire avant de mourir. Moi j'ai la chance de SAVOIR et donc de choisir, même si mes choix sont limités par ma santé détérioré, je peux quand même choisir.
  • Tu vois cela comme un cadeau ?
Bien d'une certaine façon oui.  C'est comme si le voleur qui vient cambrioler ma maison m'avertit avant pour que je puisse enlever mes objets précieux. Mourir sans préavis c'est comme se faire voler sans avertissement, se faire voler sa vie. Moi la vie m'avertit d'avance que la date de péremption arrive, c'est à moi et à nous dans mon entourage à maximiser ce temps. En même temps que je dis cela, profiter de la vie ou maximiser son temps ne tient pas nécessairement de l'extravagance. Non non, simplement profiter des moments du quotidien qui nous sont donnés, ou que nous pouvons créer parfois, pour s'apprécier, rire ensemble, se parler, partager une bonne bouteille ou une bonne bouffe ou encore mieux les deux. C'est un cadeau de ne pas me faire voler ces occasions là sans avertissement. Tu vois?
  • Oui oui je vois, mais c'est triste tout de même non ?
Ben oui c'est triste! Évidemment c'est triste ! Mais j'ai un choix là de rester dans la tristesse et de manquer les beaux et bons moments que la vie pourra m'offrir par le biais de ma famille et mes proches. Ou accepter que cette tristesse est là, mais que la JOIE est beaucoup plus vivifiante ! Avoir le coeur à la joie pour chaque rencontre que je ferai, pour chaque jour que la vie me donnera n'est pas nier la tristesse qui habite les miens et qui m'habite aussi. C'est simplement ne pas lui donner tout le pouvoir.
  • Tu en seras capable ?
Je le souhaite ardemment. Toutes mes prières vont en ce sens. Je n'ai jamais prier pour la guérison (certains diront que j'aurais dû), mais j'ai toujours prier pour la force de rester debout et profiter de la vie qui me reste. Je souhaite pouvoir être fidèle à cela, sans négliger les émotions que les miens vivront au travers cette expérience. Et sans négliger les miennes non plus.
  • Je t'admire!
Oh c'est normal que tu m'admires tu es mon égo, donc dans les faits tu t'admires toi même, hahaha. Non ne m'admire pas car je suis probablement un lâche. Au lieu de faire face à la noirceur que cette nouvelle apporte dans ma vie, je choisit de la fuir en mettant le focus sur le positif.... quel lâche je fais ! Mais je m'accepte bien dans cette lâcheté car la VIE m'appelle ! Dans tous les sens du mot VIE/vie.

MERCI LA VIE !

jeudi 4 janvier 2018

ENTRÉE CCCLII(352) - MON ESPÉRANCE

ENTRÉE CCCLII
04-01-2018
MON ESPÉRANCE

  • Ah je suis curieux !
Alors laisse moi aller sans intervenir pour une fois pendant que je me permette de nomme mon espérance en ce début d'année.
  • J'imagine que tu vas espérer la guérison ?
 Incroyable ! Je te demande de me laisser aller sans intervenir et tu en es incapable. Tais toi donc et écoute !
CE QUE J'ESPÈRE EN CE DÉBUT 2018:

J'espère que  ma douce soit aimée par son homme qui arrêtera de chialer pour tout et rien;
J'espère que mes enfants demeurent en santé et aient un père aimant et attentionné;
J'espère que mes petits enfants connaissent un papi chaleureux, sage et patient;
J'espère que mes proches sachent combien je les aime;
J'espère....
  • Ouin il me semble que tu TE donnes tout un programme pour cette année ?
Je savais que tu ne pourrais t'empêcher.  Il est vrai que je ME donne un programme de vie général si tu veux.  Mais tu auras compris que derrière ces souhaits il y a aussi une espérance qui ressemble à quelque chose comme celle d'un VIVANT! Je peux poursuivre ?

J'espère que notre société d'abondance se tourne vers les plus démunis de tous ordres;
J'espère que nos organismes communautaires si essentiels soient soutenus et encouragés;
J'espère que  les puissances du monde s'impliquent dans les pays où la famine et le nettoyage ethnique ont cours;
J'espère que les charismes des communautés religieuses vieillissantes ne soient pas perdus à tout jamais;
J'espère que l'appel du Pape François d'une Église de proximité soit entendu et mis en pratique;
J'espère que Donald Trump soit retiré comme président des États-unis;
J'espère que Justin cesse de pleurer:
J'espère que la corruption et l'incompétence soient enrayées dans nos gouvernements; 
J'espère que que la philosophie de revenu minimum garanti prenne racine au Québec;
  • Bon au moins là ça ne repose pas sur tes épaules !
Non en effet mais sur NOS épaules à tous et à toutes. Je poursuis avec des souhaits un peu plus terre à terre...

J'espère que ma tribu puisse réaliser leur rêve et vivre leur passion;
J'espère que chacun de mes enfants soit capable de bien accueillir l'être qu'il ou qu'elle est;
J'espère que que mes enfants et petits enfants soient aimés pour qui ils ou elles sont;
J'espère que mon fils humoriste gagne un Olivier;
J'espère que ma douce puisse dormir convenablement;
J'espère que toute ma famille puisse continuer de rire et d'avoir du plaisir ensemble; 
J'espère que tout ceux et toutes celles que j'aime apprécient la vie à son maximum au quotidien;
  • Et rien pour toi ?
Si tout ce que je viens d'espérer se réalise je serais déjà comblé, mais oui je pense aussi à moi: 

J'espère vivre dans le moment présent, chaque moment présent;
J'espère, pour arriver à vivre  ce qui précède, arrêter d'espérer;
J'espère que ma santé soit à son meilleure le plus longtemps possible;
J'espère que je continuerai à être si aimé et si bien entouré;
J'espère plusieurs bons repas bien arrosés avec mes amis et mes proches; 
J'espère voir plusieurs spectacles de mon fils humoriste;
J'espère voir mes enfants heureux et comblés;
J'espère ne plus souffrir (oui je sais c'est impossible, mais je peux espérer);
J'espère continuer à sentir Dieu proche de moi;
  •  As-tu fini, je suis essoufflé ? 
Je pourrais continuer encore longtemps, ll m'en reste encore plusieurs espérances, peut être même les plus importantes. Mais j'arrête ici, ma gorge est en feu et je suis assez fatigué. Le fait d'avoir sauté mon traitement de chimio de la semaine dernière ne m'a pas procuré beaucoup de leste, Je ne me suis pas senti beaucoup mieux jusqu'à date. De plus j'ai attrapé le rhume. Mais bon il y a pire que ça dans la vie. Je vois mon oncologue la semaine prochaine avec le résultat de mon dernier scan et de mes derniers traitements.

J'ESPÈRE que tout ira bien.... haha

Merci la VIE !



 
 









mardi 2 janvier 2018

ENTRÉE CCCLI(351) - BÉNÉDICTIONS

ENTRÉE CCCLI
02-01-2018
BÉNÉDICTIONS

  • Tu veux nous bénir ?
Il y a une expression on anglais qui dit: "COUNT YOUR BLESSINGS". On pourrait traduire  par SOIS RECONNAISSANT POUR CE QUE TU AS. Alors en ce début d'année j'ai comme le goût d'être reconnaissant pour ce que j'ai dans ma vie de bénédictions grâce à la Vie.
  • Tu vas sûrement commencé par moi ? 
Eh ben non mon petit égo humble. Je vais commencer par rendre  grâce pour la présence de Nycole dans ma vie. Nycole et moi fêterons bientôt nos 50 ans ensemble (moi je dis 50 Nycole dit 49) dont 45 de mariage. Nycole a été et est toujours une partner incroyable, patiente et accueillante de mes folies, mes angoisses et mes humeurs changeantes. Mais surtout, et je l'ai dit souvent, Nycole m'a appris et m'apprend toujours l'amour. Elle est une femme d'exception avec de nombreuses forces et qualités. Capable de diriger un entreprise et une grande famille sans perdre pied et sans oublier l'essentiel de la vie et j'ai nommé AIMER. Je considère Nycole comme une bénédiction dans ma vie mais aussi dans la vie de bien du monde. Je mesure encore plus la force de Nycole depuis deux ans. Elle tient la famille presqu'à bout de bras. Heureusement elle pourra aller se reposer au chaud bientôt. Ça lui fera un grand bien. Nycole me fait rire. Nous avons appris ensemble à ne pas prendre la vie trop au sérieux et rire en masse, de la vie et de soi. J'avoue que depuis un temps on pleure souvent ensemble, mais on a jamais arrêté de rire. Et moi le rire de Nycole c'est comme de l'eau sur une terre aride. Cela me nourrit et fait le plus grand bien.
  • Là c'est de moi que tu vas parler ?
Hé non plutôt de mes enfants. Ça fait cliché de dire cela je sais, épouse et enfants une bénédictions. Mais c'est le cas. Je suis choyé d'avoir une tribu qui est belle, forte, riche en talents et en capacité de solidarité les uns envers les autres et envers la société. Je suis convaincu que tous les parents voient leurs enfants et petits enfants dans leur soupe, et c'est normal un peu je pense bien, mais je reconnais dans ma vie, et encore plus depuis deux ans, combien mes enfants me donnent vie! J'ai tenté de leur partager cela à Noël mais l'émotion  a pris le dessus. 
  • Et tu sais que ton égo devrait avoir une place prioritaire non ?
Oh la la tu en fais presque pitié! Je suis béni aussi d'avoir dans ma vie des personnes que j'aime de façon bien particulière et qui m'aiment aussi de façon particulière. Je me sens choyé, bien entouré et soutenu dans ma vie par ces personnes, depuis longtemps, et encore plus intensément depuis l'arrivée d'ARNOLD dans ma vie. Je pense entre autres à Francine et Siméon, de fidèles compagnons de route depuis plus de trente ans. Depuis deux ans ont rarement manqué un traitement de chimio avec moi, et je les reçois aux deux semaines. Mais au delà de cela c'est la qualité de ces deux personnes qui en font une bénédiction dans ma vie. Des personnes avec un "bon fond" comme dirait ma mère. Je pense à ma soeur et beau-frère, des fidèles de toujours, mais qui vivent ces deux dernières années intensément avec nous et qui accueille nos larmes et nos craintes, mais qui acceptent aussi de rire avec nous. Ces gens qui nous entourent si bien, souffrent aussi avec nous mais reste proche dans la souffrance comme dans la réjouissance. C'est riche de vérité! Je pense aussi aux personnes qui prennent de nos nouvelles et qui savent écouter et accueillir.
  • Bon c'est un peu tard, mais tu arrives finalement à moi ?
Il faudra attendre encore un peu cher égo! Non je veux mentionner les équipes médicales qui s'occupent de moi depuis deux ans. Malgré mon impatience, mon chialage, mes insécurités, mes doutes envers le réseau je dois reconnaître que je suis pris en charge (expression que je déteste en passant) de façon compétente et professionnelle et qui plus est de façon généralement humaine. (Oui une petite nuance dans cette bénédiction. Hahaha). 
  • Alors moi ?
Écoute je veux dire merci à la vie pour  ma capacité de faire face à ce qui m'arrive, de façon généralement "acceptable". J'ai mes moments de forces et de faiblesses, je me permets de pleurer et j'insiste de continuer à rire. J'ai mes downs et j'ai mes hauts. Mais ce que j'ai, dont je suis le plus fier, c'est ma capacité de reconnaître les bénédictions qui nourrissent mon quotidien (ou presque) malgré les attaques incessantes d'ARNOLD et les traitements qui le combattent. Je n'ai pas de mérite c'est une grâce que je reçois et que j'accueille, les vieux diraient la "grâce d'état". Merci la vie pour cette grâce.
  • Laisse faire y é trop tard !!!
Il n'est jamais trop tard pour dire merci à la Vie. Tu auras compris que je pourrais continuer encore longtemps: mon livre et sa traduction en cours, les visites qui me font du bien, les oiseaux et la nature, la musique, la bonne bouffe et le bon vin, les blagues, le rire des miens, le sourire de Nycole et ses yeux qui baignent dans l'amour,  etc.... Et tout ce que la vie m'a donné de beau, de bon et de moins bon dans mon parcours qui ont aidé à me construire.
  • Et MOI!!!!!
Oui oui je suis chanceux de t'avoir. Tu as été important dans les succès qui ont jalonnés un peu ma vie. Grâce à toi j'ai eu plus d'audace que j'aurais cru possible. Tu me permets, entre autres,  de penser prétentieusement que j'ai des choses suffisamment importantes ou intéressantes à dire que je me permette d'écrire un blog.
  • Donc MOI c'est la prétention que je t'apporte !!!!
MERCI LA VIE et BONNE ANNÉE. Soyez bénies dans l'assurance des personnes choyées par la VIE et dans l'espérance que le meilleur est à venir!