dimanche 5 mars 2017

ENTRÉE CCLXXXIX(289) - BANALISER

ENTRÉE CCLXXXIX
05-03-2017
BANALISER

  • Qu'est-ce qui est banal ?
C'est à dire qu'une amie m'a fait remarquer que j'ai tendance à banaliser mes états d'âme: "il y a pire que ça dans la vie"; "ce n'est pas la fin du monde"; "si je me compare aux autres je suis quand même chanceux".  
  • Y a rien de mal là dedans il me semble, c'est une façon positive de voir les choses non?
 Oui d'une certaine façon, mais son commentaire m'a aussi fait réaliser que cette façon de toujours minimiser l'impact qu'ont les effets secondaires sur moi envoie aussi un message ambigu. C'est comme si j'essaie de me convaincre que les effets secondaires ne sont pas si graves que cela et pourtant je les vis assez difficilement. Alors sont-ils graves ou pas ? Doit-on s'en préoccuper ou les ignorer ? Est-ce que je me plains pour rien ? Est-ce que mes proches doivent s'en faire ou pas ? Je ne sais pas si je l'exprime bien, mais c'est comme parler des effets secondaires et ensuite les minimiser ou banaliser peut envoyer un message réducteur de ce que je vis vraiment.
  • C'est grave cela ?
Je ne sais pas ! Mais je me pose la question pourquoi je fais cela. Ce que j'ai compris de mon amie, c'est que quand j'exprime mon désarroi ou le fait que je remet en question mes traitements elle demeure surprise. Je pense qu'elle se demande d'où vient ce sentiment ? Voilà l’ambiguïté du message.  Si les effets secondaires ne sont pas si pire, pourquoi est-ce que je remettrais en question les traitements. 
  • Oui je vois en effet l’ambiguïté. Es-tu en train de dire que les effets secondaires sont pires que ce que tu nous laisse croire ?
Pas nécessairement. Je crois honnêtement que mes effets secondaires, si je les compare à d'autres effets vécus par d'autres patients, ne sont pas "aussi" pires que les leurs. Mais ayant dit cela je n'ai rien dit vraiment n'est-ce pas ? J'ai toujours dit à mes patients et leurs familles que la douleur de l'un ne diminue ps la douleur de l'autre. On ne peut comparer les douleurs. La douleur physique est très subjective et est très liée à l'expérience individuelle de la douleur. Une douleur modérée chez l'un peut être une douleur aiguë pour l'autre. C'est pourquoi l'échelle numérique de la douleur est utilisée dans les soins de la douleur. Une douleur à 3 pour un peut être une douleur à 7 pour un autre et elle doit être traitée ainsi.
  • Donc si tu avais à nous partager comment tu vis les effets secondaires, sans les qualifier, tu dirais quoi?
Que je suis écœuré de les vivre hahaha ! Peut être que ma tolérance n'est pas très forte, mais je viens de passer quatre jours à dormir et à absolument ne rien faire. La fatigue prenant toute la place. Des maux têtes et de ventre s'ajoutent parfois et quelques nausées, quoique cette fois ci j'en ai pas eu beaucoup. J'ai sorti aujourd'hui pour aller diner avec mon frère pour ses 60 ans. Au retour j'ai dormi 3 heures, je me suis réveillé avec des maux de tête assez forts. La  moindre activité exige que  je me repose avant et après. En soi et à première vue cela semble un peu banal, pas grave, pas si pire que cela et objectivement en effet ce n'est pas si pire. Mais le vivre au quotidien, jour après jour, semaine après semaine, mois après mois, devient réellement une croix à porter. 
  • Mais le sachant ne t'aide pas à l'accueillir ?
C'est vrai, je m'y attends maintenant donc je sais que la semaine de mon traitement risque d'être une semaine perdue à partir du mardi jusqu'au samedi ou dimanche. Ce n'est plus une surprise. Mais qu'est-ce que cela change ? Je les vis quand même, même si je les attends. C'est comme les maladies chroniques, on a beau connaître les effets au quotidien, mais cela ne les rends pas plus faciles à vivre.  Aussi je me rends compte que même si je le sais, j'ai toujours l'attente que ce sera moins pire cette fois-ci, que la deuxième semaine sera moins pire, que j'aurai plus d'énergies. Et à chaque fois je vis de la déception et de là mon questionnement sur la pertinence de vivre ainsi revient.
  • Et accepter une fois pour toute que c'est ainsi que ta vie se déroule désormais, pas possible?
Oh que ça c'est facile à dire pour quelqu'un qui n'a pas à subir ces attaques quotidiennes. La douleur, l'inconfort, les limites ne deviennent jamais des habitudes, des compagnons de route acceptées. Au mieux on les tolère, au pire les hais. Mais a tolérance a aussi ses limites.
  • On dirait que tu remets en question tes traitements et leur pertinence ?
Pas vraiment. Mais je questionne  ma vie actuelle. Quelle sera la ligne, la limite, la frontière qui m'indiquera que j'en ai assez. Comme je rationalise, je minimise et banalise je redéfinis cette frontière à chaque fois. J'ai toujours dit qu'on accepte de mourir quand vivre devient plus difficile que de mourir. Je ne suis assurément pas rendu là.  Il est vrai que je ne sais pas comment je me sentirais si je cessais les traitements. Certains diront de l'essayer, d'autres diront non reste sur CHIMIVIE c'est ta meilleure chance. Qui sait ce qu'est la meilleure route à suivre. Celle que je choisi est la meilleure, Même si je dois la re-choisir à chaque traitement. Mais une chose certaine c'est que je suis encore capable de dire MERCI LA VIE!

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